À l’aube de 20e siècle, les véhicules se font encore rares sur les routes. Les forges réalisent à l’époque les réparations, car les garagistes n’existent pas encore. Lorsque Wilhelm Schäferbarthold se rend compte que les forges rencontrent d’importants problèmes à se procurer des câbles Bowen pour effectuer leurs réparations, il fonde le 1er avril 1924 sa petite entreprise « Wilhelm Schäferbarthold » et se spécialise dans le secteur. Les locaux de sa société se résument à la cuisine et à la chambre à coucher de son habitation privée au Königswall 84. Aux côtés de l’homme de 57 ans se trouvent son fil Hermann et sa femme Anna-Louise.
La gamme de marchandises offerte se développe rapidement. Le premier catalogue regroupant des pièces de rechange et des accessoires pour les motos et les automobiles paraît en 1925 et compte 16 pages, celui de 1926 en comprend déjà 96. En 1927 est construit le siège de l’entreprise dans la Frankenring 20 (renommée plus tard Ringstraße) de la ville de Minden. Malgré une perte de capital significative en raison de l’inflation ainsi qu’un manque perpétuel de place pour le stockage des produits, Wilhelm Schäferbarthold continue de faire croître son entreprise. Des bâtiments supplémentaires sont érigés dans la Frankenring et le catalogue de 1939 compte ainsi 493 pages de produits que 72 collaboratrices et collaborateurs envoient à une clientèle allemande et de plus en plus internationale.
En avril 1943, le ministère du Reich prend des dispositions en matière d’armement et de munition dans l’optique de prévenir les retards de livraison lors de la Seconde Guerre mondiale. Seule une sélection de revendeurs qui n’ont pas souffert de dégâts militaires peut commercialiser des pièces de rechange automobiles. Schäferbarthold devient un point de distribution, mais ne connaît qu’une progression temporaire de ses bénéfices.
Hermann Schäferbarthold reprend la direction de l’entreprise en 1942. En raison d’une blessure survenue dans son enfance, il ne peut pas faire son service militaire et s’est donc assuré que l’entreprise reste réactive malgré une pénurie de personnel appelé à rejoindre les rangs. Il mise ainsi sur la méthodologie REFA et améliore l’environnement de travail des effectifs en mettant en place un espace social, une bibliothèque et en proposant du sport en entreprise. Il s’aligne également sur les concepts du mouvement « Kraft durch Freude » (La force par la joie) proposé par une organisation de l’État nazi. Bien qu’il se rapproche de l’idéologie du national-socialisme, il n’est pas profondément convaincu, ce qui se confirme à l’occasion de la confirmation de son fils aîné à l’église évangélique Saint-Petri en 1943. Lors de la dénazification, il a été qualifié d’homme « politiquement neutre, très religieux et seulement un membre nominal ».
Pour Schäferbarthold, la croissance aurait pu rapidement reprendre après la guerre, car l’entreprise est restée épargnée par les bombardements aériens. Cela s’est toutefois révélé être un inconvénient, car le bâtiment est réquisitionné en février 1946 et est occupé pendant plus de dix ans par la puissance occupante anglaise. La société a dû se délocaliser dans plusieurs hébergements provisoires, dont la fabrique de cigares André à Südhemmern. Hermann Schäferbarthold prend donc la décision de se concentrer sur des activités d’exportation qui ne nécessitent pas de stockage. Le service d’export fondé en 1952 approvisionne déjà en 1960 tous les continents et en 1964, l’export représente 64 pour cent du chiffre d’affaires de l’entreprise qui livre cette année-là dans 68 pays, puis dans 91 pays en 1968. Le manque d’espace a cependant conduit Hermann Schäferbarthold à réduire de manière ciblée la diversité de ses produits. Il se focalise désormais dans le développement de nouveaux articles, notamment des accessoires qu’il commercialise sous la marque « Propeller ». Il s’agit de phares, de garnitures de sièges, de vases pour le tableau de bord, de trousses de secours, de rétroviseurs extérieurs et bien plus encore. Hermann Schäferbarthold a même obtenu un brevet pour une bavette pare-boue qu’il est possible de monter sans percer.
Au milieu des années 1950, le fils aîné d’Hermann Schäferbarthold, Winfried, fait son entrée dans l’entreprise familiale, mais la quitte en 1962 en raison de divergences avec son père. En 1966, le cadet Volker devient le successeur, mais la situation est différente. Plus les années passent, plus certaines spécificités d’Hermann se développent à l’extrême au point de pénaliser l’entreprise. Son sens de l’organisation et son intérêt pour la méthodologie REFA avaient permis de bien structurer le quotidien professionnel pendant la guerre, mais engendrent désormais une bureaucratie excessive et des formulaires administratifs démesurés. Sa passion pour la qualité et la marque Propeller l’ont conduit à fabriquer des emballages onéreux , sans prendre en compte la baisse des recettes. Hermann Schäferbarthold rencontrait des difficultés à valoriser le travail d’autrui, ce qui a entraîné une importante fluctuation du personnel. Hermann Schäferbarthold s’incline devant la pression de Winfried et de Volker, des dirigeants de l’entreprise et des représentants bancaires, et cède la société endettée à ses deux fils.
Les frères Winfried (à gauche sur la photo) et Volker (à droite sur la photo) dirigent depuis 1972 la société sise dans la Ringstraße de la commune allemande Minden. Winfried est responsable de la gestion commerciale tandis que Volker développe les ventes. Les collaboratrices et collaborateurs sont encouragés à prendre des initiatives et à apporter de nouvelles idées. Une nouvelle culture d’entreprise voit le jour. Une politique stricte de rigueur budgétaire est adoptée afin de relancer l’entreprise. Winfried a également arrêté les produits et les gammes de produits qui n’étaient plus rentables. Deux ans après la reprise de la société par la troisième génération, celle-ci est de nouveau lucrative, même si des dettes doivent encore être remboursées. La croissance de l’entreprise a nécessité la construction de bâtiments supplémentaires dans la Ringstraße, mais la place allait bientôt manquer. Un déménagement progressif a donc eu lieu en 1978 sur le site actuel dans la Erbeweg dans le quartier Porta Westfalica-Barkhausen à Minden. Le service administratif a suivi en 1982.
Dans les années 1980 et 1990, Schäferbarthold limite son portefeuille de produits et se concentre sur des produits de niche. Des pièces inédites sur le marché sont également développées. à l’image des consoles accoudoirs pour les Mercedes des gammes W 123 et W 124 commercialisées en exclusivité par Schäferbarthold et qui ont rencontré un franc succès. La société fait également produire des Le Mans stripes et d’autres pièces par des fabricants externes. La part d’accessoires diminue du chiffre d’affaires, car les véhicules sont mieux équipés. En 1984 éclate un litige interminable afin de savoir si les garagistes doivent se fournir en pièces originales uniquement auprès du fabricant. Schäferbarthold renforce donc ses activités en ajoutant des pièces de rechange originales et adapte ses services aux exigences des garagistes, donnant naissance à des relations à long terme avec sa clientèle.
Dr Volker Schäferbarthold concentre son énergie sur le développement des ventes nationales et internationales. Dans les années 1980, Schäferbarthold fonde « Schäferbarthold of North America, Inc. » à Torrance, Los Angeles, une filiale pour les marchés nord-américain et canadien. Les pays scandinaves, notamment le Danemark et la Suède, représentent une région exportatrice importante en Europe, au même titre que l’Autriche, l’Angleterre, la Belgique, l’Italie et surtout, la France. Dans les années 1990, la commercialisation en Europe se renforce avec le marché intérieur européen. L’harmonisation des méthodes de travail spécifiques aux pays exige alors une consolidation des normes internationales de qualité. En 1994, Schäferbarthold est la première entreprise allemande de commerce de gros de pièces automobiles et d’accessoires, et la deuxième entreprise de la CCI d’Ostwestfalen à obtenir la certification DIN ISO 9002/EN 29002 en matière de gestion de la qualité.
Après le décès inattendu de Winfried Schäferbarthold, les fils de Volker, Wolfgang et Christian, a respectivement 32 et 30 ans, intègrent en 1999 la direction, et ce, plus tôt que prévu. Ils commencent au sein d’une équipe de trois personnes avec Volker, puis restent à deux à partir de 2005. Contrairement au passage du flambeau de 1972, celui-ci s’effectue sans difficulté. Tandis que Wolfgang est responsable de l’audit, des traitements des factures et du développement du personnel, Christian s’occupe dans un premier temps des thématiques informatiques et logistiques.
La logistique est modernisée. L’ancienne organisation de l’entrepôt en fonction des numéros d’article doit céder sa place à un système de stockage dynamique rendu possible grâce à une importante assistance informatique. De nouvelles aires de stockage ont été agencées avec des rayonnages hauts afin d’économiser de la place et de remplacer les entrepôts en structure légère. La modernisation était un projet majeur pour Dr Christian Schäferbarthold. Les coûts de construction ont été estimés à environ 15 millions de marks allemands pour un chiffre d’affaires annuel de près de 60 millions de marks allemands. Pour des raisons économiques, certains responsables ont continué de privilégier des entrepôts en structure légère, mais Christian et le responsable de la logistique, Olaf Marin, étaient convaincus de la nécessité de moderniser.
Le projet s’articule et est financé en deux phases, et comprend aussi l’utilisation d’un système moderne de gestion des stocks. Le nouveau centre logistique terminé en 2007 a coûté au total 7 millions d’euros et fournit une clientèle répartie dans 70 pays, dont 15 pour cent en dehors de l’Europe. Au début, ce sont 15 000 articles pour plus de 40 marques automobiles qui sont stockés, et 97 pour cent des commandes quotidiennes sont traitées dans un délai de 24 heures.
Une voie publique, appelée « Caripar » comme la marque commerciale, facilite la connexion. Suite à des travaux d’agrandissement réalisés en 2018, les quatre entrepôts profitent à présent d’une surface de plus de 22 000 m². Le lancement d’une boutique en ligne en 2005 et le réagencement du magasin en 2012 font également partie du projet de modernisation.
Schäferbarthold a également développé des marques spécifiques telles que Caripar, OE-Fit et OE-Cult dans le but de répondre aux besoins spécifiques de sa clientèle.
Wolfgang et Christian Schäferbarthold ont perpétué les valeurs de leur père et de leur oncle en soulignant l’importance du personnel. Outre les motivations financières, l’entreprise est en mesure de proposer des solutions individuelles, du fait de sa structure familiale, pour répondre aux préoccupations de ses effectifs. Une attention particulière est portée au partage intensif des connaissances. Les collaborateurs et collaboratrices travaillent en effet jusqu’à deux ans avec le successeur afin de combiner l’expérience aux idées nouvelles.
La formation occupe depuis toujours une place importante dans l’entreprise. Schäferbarthold forme ainsi des négociants en gestion de commerce de gros et extérieur, des professionnels en logistique des entrepôts et des négociants en e-commerce. Étant l’une des quelques entreprises à offrir un programme de formation, elle fournit des connaissances pratiques en commerce extérieur. Schäferbarthold met à disposition des examinateurs pour la CCI et des locaux pour les examens. De nombreux collaborateurs et collaboratrices ont par ailleurs commencé leur carrière en tant qu’apprentis au sein de Schäferbarthold.
Depuis un siècle, Schäferbarthold s’est affirmé sur le marché grâce à sa flexibilité et à ses innovations. Mais le grand changement reste à venir, à savoir, l’électromobilité. Les estimations montrent qu’une partie du segment clé de l’entreprise, « véhicules récents de jusqu’à quatre ans » disparaitra d’ici à 2039 pour les véhicules thermiques. La société reste toutefois confiante et a déjà de nombreuses idées pour assurer une croissance saine.
La cinquième génération,
représentée par les fils de Dr Christian Schäferbarthold, Paul, Justus et Henri, devra se confronter aux défis de cette situation de marché. Wolfgang a déjà entièrement, et Christian partiellement, cédé ses parts aux enfants de Christian afin de garantir un passage de relais optimal. Cette décision est un signal envoyé aux effectifs que la famille propriétaire continue de travailler ensemble afin de faire perdurer l’entreprise de la Erbeweg à Porta Westfalica.
